Dans la foulée de toutes les activités qui ont entouré l’Année internationale de la femme en 1975, le féminisme a commencé à s’organiser en Estrie : naissance du chapitre estrien de la Fédération des femmes du Québec, du Centre éducatif de la femme de Sherbrooke, de la Maison des femmes de Sherbrooke, laquelle a donné naissance au Centre de Santé des femmes et au CALACS. L’Escale existait déjà.
En 1980, le Conseil du statut de la femme a ouvert des bureaux régionaux dans onze régions du Québec dont l’Estrie. Sa représentante, Nicole Dorin, suite à une tournée régionale dans 13 villes et villages et après avoir rencontré des centaines de femmes, a constaté que les femmes étaient pauvres et isolées, leurs organisations très pauvres et tout aussi isolées, l’information ne circulait pas entre les groupes, la formation et l’analyse féministe était très variable, la solidarité était à bâtir. Forte de cette information et appuyée par les protagonistes locales du féminisme de l’époque, elle a mis sur pied ce qu’il a été convenu d’appeler pendant des années : « La Table de concertation des groupes de femmes en Estrie » qui est devenue en 1998 ConcertAction Femmes Estrie.
Photo d’une marche dans les rues de Stanstead, tirée du journal de Stanstead, «The Journal», le 18 octobre 2000, dans le cadre des actions de la Marche mondiale des Femmes. On y voit près de 800 femmes, dont plusieurs élèves des quatre écoles secondaires de Stanstead.
Une affiche du 8 mars 1975
Source : http://archives.radio-canada.ca/sante/droits_libertes/clips/3291/
À partir de ce moment, elle a entrepris avec les groupes de femmes de travailler à l’accessibilité aux différentes sources de financement dont Centraide au tout début. Grâce au premier sommet socio-économique régional organisé par le CRD Estrie, trois groupes de femmes différents ont eu accès à un financement de base important : le Centre de santé des femmes de Sherbrooke, le CIRF de Lac Mégantic et l’Escale de Sherbrooke. Simultanément le travail était amorcé sur le plan provincial et fédéral pour reconnaître les groupes de femmes comme des ressources indispensables pour les femmes afin de leur assurer sécurité, formation, soins, accès à la justice et au travail.
Au cours de ces années, les femmes des groupes de femmes ont acquis grâce à la formation et à leur expérience terrain, une meilleure connaissance des problèmes vécus par les femmes et ont développé des approches spécifiques. En dehors de leur sphère respective elles ont, au fil des ans, appris à former des partenariats avec les organismes et les décideurs du milieu ce qui a favorisé la connaissance et la reconnaissance des femmes et des services offerts par les groupes de femmes.
Au fil des ans, les groupes membres ont constamment senti le besoin d’harmoniser leurs objectifs et le fonctionnement de la table aux nouvelles réalités qui se présentaient à eux. Ainsi, en 1992, puis en 1998, les membres ont remanié les objectifs et le mode de fonctionnement de leur table régionale. ConcertAction Femmes Estrie (CAFE) est toujours une plate-forme évolutive aux services des femmes et des groupes de femmes de la région. Les organisations régionales de la Marche du pain et des roses en 1995, les Marches mondiales des femmes contre la pauvreté et la violence en 2000, 2005, 2010 et 2015, l’ont rendu plus visible, solidaire et organisée. Poussée par ce vent de solidarité CAFE a produit en février 2008 un cahier spécial sur le féminisme dans la Tribune : « Féministes : agentes de changement ». Ce cahier aura interpellé plus d’une et plus d’un, aura suscité le débat et remis « à la carte » la question du féminisme en Estrie.
En plus de la solidarité entre les groupes de femmes, CAFE a établi depuis plusieurs années une solidarité avec d’autres regroupements estriens pour s’assurer que les politiques gouvernementales permettent une réelle lutte à la pauvreté. CAFE fait la promotion de l’analyse différenciée selon les sexes avec une perspective intersectionnelle (ADS+) afin que les politiques et le financement des programmes sociaux et services publics répondent aux besoins de toutes les femmes avec considération et respect de leur diversité.
CAFE jouit d’un enracinement dans la région de l’Estrie. Son implication dans la défense des droits des femmes et d’actions vers la justice sociale est reconnue tant dans le milieu communautaire, syndical, qu’institutionnel.